Michel Barnier publie son "journal secret du Brexit"

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1,600, c’est le nombre de jours qui se seront coulés entre le 23 juin 2016, date du référendum sur le Brexit, et l’accord trouvé à la veille de Noël 2020, après des mois et des mois de négociations “oscillant sans cesse entre consensus et crispations, espoirs et doutes, transparence et mensonge”. C’est dans les coulisses de ces quatre années de relations compliquées et tendues entre l’Union européenne et le Royaume-Uni, que Michel Barnier emmène les lecteurs dans son dernier livre, La Grande Illusion, paru jeudi 6 mai chez Gallimard.

“Une aventure humaine”

Le Français, qui fut le négociateur en chef pour l’Union européenne pendant toute cette période, raconte ainsi dans ce “journal secret du Brexit” de plus de 500 pages l’envers du décor de ce “théâtre diplomatique où se joua parfois une véritable guerre des nerfs”. “Tout au long de ces quatre années et demi, j’ai cherché à comprendre les raisons qui ont poussé 17 410 742 citoyens britanniques à voter contre l’Union européenne”, écrit-il, et ainsi conduire à cet “événement improbable” qu’a été le Brexit.
Invité de France Inter lundi 3 mai, Michel Barnier a expliqué, “il y a dans ce vote du Brexit, des raisons, des colères, des signaux qu’il faut aussi entendre de notre côté de la Manche. Bien sûr, il y a des raisons britanniques, certaines nostalgies, des marchés financiers qui n’aiment pas les règles européennes car ils sont contraints ou surveillés mais il y a des raisons bien plus profondes dans beaucoup de régions pauvres (…) en manque de considération et de respect”.  
Il a qualifié ces quatre ans et demi d’“aventure humaine” qu’il a vécue aux côtés d‘”une équipe exceptionnelle de 70 personnes, paritaire et de 22 nationalités”. Son expérience précédente lui aura été bénéfique, selon Michel Barnier. “Vous n’imaginez pas à quel point ce que j’ai appris avant, en étant élu de Savoie avec les agriculteurs et les entreprises, en ayant été ministre de le pêche, en régulant les services financiers en tant que commissaire européen, en recevant des syndicats ou des chefs d’entreprises, m’a été utile. Parce que je n’ai pas été surpris par les sujet de la négociation”, a poursuivi l’ancien chef négociateur.

Le Brexit, un affaiblissement pour l’Europe

Le titre du livre, “La Grande Illusion”, est inspiré de l’essai de Norman Angell, datant de 1909, dans lequel l’Anglais démontre que “la guerre est un affaiblissement dont tous les protagonistes, qu’ils soient proclamés vainqueurs ou vaincus, sont perdants”.
Le seul point positif du Brexit, a souligné Michel Barnier, est qu’il peut être vu comme un “signal d’alerte”, “un avertissement” pour l’Europe. “Mais franchement, le Brexit c’est loose-loose, c’est un divorce, personne n’est capable de dire qu’un divorce est positif, c’est toujours un affaiblissement. Et dans le cas présent, nous perdons un pays de 60 millions d’habitants, avec une diplomatie, une défense, une capacité d’exportation. C’est donc un affaiblissement pour (l’Europe) amputée de ce pays, mais c’est aussi un affaiblissement pour le Royaume-Uni qui se retrouve tout seul face au grand large des Etats-Unis, de la Chine ou encore de la Russie”.
Michel Barnier a confié au micro de la matinale de la radio française que son expérience de la randonnée lui a permis de garder son calme pendant toute la période de négociation. En bon Savoyard, a-t-il expliqué, “j’ai l’habitude des grandes randonnées en montagne, de faire attention aux marches. Une randonnée ça peut toujours être dangereux et puis il faut toujours regarder le sommet, car cela aide de lever les yeux de voir quelque chose à l’horizon”.
Dans le contexte du Brexit, cet horizon s’axait sur trois points, selon le Français : “préserver les intérêts de l’Union européenne, des entreprises, des pêcheurs, des agriculteurs, des citoyens dont nous avons protéger les droits. J’ai aussi toujours eu le souci de la paix en Irlande et enfin, la coopération que nous devons garder avec le Royaume-Uni qui est un grand pays, allié, ami et partenaire”. 
Concernant Boris Johnson, le Français l’a qualifié d’“homme de gouvernement. Il a clairement de l’intelligence, est cordial, chaleureux et très pragmatique. Même si j’ai trouvé curieux ou baroques un certain nombre de ses déclarations dans le passé, comme quand il a été ministre des Affaires étrangères. Je crois qu’il lui faut encore un peu plus de temps pour démontrer des qualités d’homme d’Etat”.

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